Chronique | Not My God - Not My God

Pierre Sopor 3 mars 2020

L'association entre Tim Skold (qui, avant de sévir en solo, avait notamment travaillé dans KMFDM et MARILYN MANSON) et Nero Bellum (PSYCLON NINE) ne date pas d'hier : les deux artistes tournent en effet ensemble dans SKOLD, projet du Suédois. Il était temps d'officialiser leur union via une nouvelle entité, NOT MY GOD, et comme les deux sont de grands romantiques un premier album éponyme est sorti le 14 février dernier.

Les deux musiciens étaient tous les deux sur une lancée intéressante : Tim Skold sortait l'an dernier Never Is Now (chronique), peut-être son meilleur effort solo, alors que Nero Bellum se lançait lui aussi en solo avec un album expérimental et atmosphérique que l'on n'attendait pas vraiment, bien loin de la frénésie tapageuse de PSYCLON NINE (dont le dernier album, déjà, annonçait une couleur plus ambiante). On retrouve un peu de cette envie de s'éloigner des zones de confort habituelles pour l'un comme pour l'autre dès Fiction, premier single et morceau servant d'ouverture à l'ensemble. Ambiance sinistre, rythme tout en retenu, mélodie inquiétante et chant menaçant de Tim Skold : les choses commencent bien et la piste vient se loger dans un coin de nos tympans pour mieux nous hanter alors que les ingrédients, déjà, nous sont présentés : beats hypnotiques et nappes lugubres vont nous accompagner tout au long de l'écoute.

On connaissait la voix de Skold, séduisante, parfois blasée : elle apporte aux nappes atmosphériques de NOT MY GOD une forme de rugosité mais aussi quelque chose d'à la fois organique et vénéneux qui transcende des compositions minimalistes en y apportant une émotion supplémentaire. Avouons : on n'attendait pas de ces deux là, habitués à plus kitch, une telle sobriété. Not My God est un album hypnotique et lancinant, contenant ses émotions et ses menaces et ne cédant jamais à la tentation du single accrocheur et rentre-dedans, ni à l'appel des guitares (on échappe aux solos dégoulinants de l'un et aux riffs bourrins de l'autre). Si l'ensemble est cohérent et plutôt efficace pour instaurer une atmosphère lugubre et glacée (les nappes de Cold Black ont des airs de ICE AGE), on pourrait regretter qu'il ne décolle jamais non plus, si ce n'est le temps de quelques lignes de chant (Right Now). Ce n'est tout simplement pas le but de Not My God, qui distille son venin et sa négativité avec une certaine subtilité, réussissant à peindre quelques paysages musicaux d'une noirceur convaincante (Murder Suicide, 13).

Ce premier album de NOT MY GOD est intéressant. Il n'est pas parfait : l'ensemble est peut-être un peu long pour s'écouter d'une traite et manque parfois de variété. Mais pour l'auditeur qui serait dans l'humeur (grise tendant vers le noir, forcément), il est la bande-son industrielle idéale, le compagnon déprimant parfait pour hanter la fin de l'hiver et casser l'ambiance. NOT MY GOD ne s'écoute pas pour remuer ou se casser la nuque avec les copains, ça s'écoute seul, dans le noir, dans le froid.