Chronique | And One - S.T.O.P.

Cécile Hautefeuille 25 mai 2012

Un an seulement après Tanzomat, AND ONE revient avec un nouvel opus intitulé S.T.O.P. AND ONE ou les morceaux recollés d’AND ONE, puisque le co-fondateur du groupe Chris Ruiz et son complice Gio van Oli s’en sont allés, laissant le leader Steve Naghavi seul commandant à bord. C’est finalement l’ancien line-up, composé de Joke Jay et Rick Schah, avec le soutien de Nico Wieditz, qui reprend du service. AND ONE quitte par la même occasion leur label Out of Line. Cela aura-t-il suffi pour insuffler de nouveaux airs au quatuor allemand ? Malheureusement non. L’album est relativement confus et le fouillis dont il se compose est à l’image de celui qui doit hanter l'esprit de Naghavi, qui n’en est plus à sa première controverse depuis quelques mois. L’album s’ouvre sur le single Shouts of Joy, la chanson la plus efficace de tout l’opus. Le reste est une escalade de déceptions. Les quatre chansons qui suivent, Killing the Mercy, Memory, You Without a Me et Don’t Get me Wrong ne témoignent d’aucune innovation. AND ONE fait du AND ONE, entasse maladroitement tous les sons qu’on lui connaît, reprend parfois des mesures entières d’anciens morceaux. A la moitié de l’album, on se demande si S.T.O.P. n’est pas simplement composé des chansons que le groupe n’avait pas retenues pour Tanzomat. L’opus prend un tout autre tournant à partir de l’interlude Aigua, agréablement susurré par une voix féminine qui rappelle une intro de trance. La deuxième partie de l’album nous réveille un peu, S.T.O.P. the Sun et Back Home sont, avec Shouts of Joy, les morceaux les plus puissants, et probablement les seuls qui pourront être intégrés à la setlist live. Tous trois construits autour d’une ligne de basse lourde et continue et d’un refrain entêtant, ces titres dansants n’apportent néanmoins rien de rafraîchissant à la discographie du groupe. The 4, un peu posé là par hasard, vient nous rappeler que le line-up actuel est aussi celui des années '90. Le titre est un clin d’œil à l’album I.S.T, et l’on s’en délecte. L’interlude instrumental qui suit, Everybody Dies Tonight, est un non-sens complet. Il vient clôturer un album qui contient encore deux chansons – et pas des moindres. On l’aurait volontiers écouté en ouverture, comme AND ONE sait brillamment en faire. Les deux dernières chansons sont les deux ovnis de S.T.O.P. Le son, autrement plus travaillé, semble tout droit sorti de l’O.S.T de Blade Runner. L'influence de Vangelis est prégnante, autant que la touche expérimentale du mystérieux Douglas McCarthy. The End of your Life, mi-Naghavi mi-McCarthy, ravira les curieux. L’instrumental No Words clôture l’album bien mieux qu’il n’avait commencé. Le piano et les chants grégoriens font écho à l’ouverture de Shouts of Joy, et voici la boucle bouclée.

S.T.O.P. était un opus très attendu par les amateurs, et les plus accrocs d’entre eux sauront s’en accommoder. C’est d’ailleurs l’intention du groupe : « Wer diese Band bisher nicht mochte, wird sie spätestens jetzt hassen -- S.T.O.P. --» (Ceux qui n’ont jamais aimé AND ONE vont à présent les détester – S.T.O.P.--). Mais un peu de recul suffit pour s’apercevoir que l’album est une succession de tentatives ratées. Les premières mesures aux mélodies léchées laissent toutes présager des chefs d’œuvre, mais se jettent finalement dans un éparpillement sonore qui perd l’auditeur. A cours d’inspiration, AND ONE se replie sur ses premières influences (DEPECHE MODE) qui n’étonnent plus personne, ce qu’ils semblent concéder aisément : « AND ONE liefern ein Werk ab, welches an dreister Selbstkopie kaum zu überbieten ist -- S.T.O.P. --» (AND ONE livre un album que l’on ne peut décrire que comme la quintessence de la contrefaçon – S.T.O.P. --). Les germanophiles peuvent s’en retourner, le groupe ne compose plus en allemand depuis Tanzomat, pourtant une originalité majeure qui leur permettait autrefois de se détacher de l'electro-pop anglaise. Est-ce la peur du vide ou la perte du public, le groupe ne s’aventure pas au-delà des sentiers battus. C’est pourtant dans cet exercice – l’instrumental et expérimental – qu’ils semblent le mieux transformer l’essai.