Chronique | Author & Punisher - Melk En Honing

Pierre Sopor 29 juin 2015

De retour après l'énorme et impitoyable Ursus Americanus sorti il y'a trois ans, AUTHOR & PUNISHER, le projet de Tristan Shone, n'a rien perdu de son envie d'en découdre. Continuant sur la voie plus sombre et apocalyptique empruntée lors du précédent album, Melk En Honing se paye même le luxe d'être produit par Phil Anselmo, dont l'apport se ressent dès The Barge, surtout sur le traitement du chant. Avec ses machines faites maison, Shone flirte toujours avec le drone, apportant à sa musique industrielle la lourdeur du doom metal, nous plongeant dans des ambiances pesantes et terrifiantes. Pachydermique, le rythme écrasant ne s'accélère que rarement, comme par exemple dans Callous And Hoof, où un break opaque et cauchemardesque vient briser tout élan, tout espoir d'éclaircie. Car Melk En Honing est un album définitivement noir, où les machines nous évoquent des paysages dévastés, des civilisations en ruine, où l'homme n'a plus sa place. Au milieu de ce chaos, l'émotion surgit parfois de quelques chants désespérés, comme dans Future Man, exprimant encore une fois tout le pessimisme de Shone. Loin des sonorités accrocheuses ou dancefloor de nombreux groupes d'indus, AUTHOR & PUNISHER nous sert une musique lente, difficile, parfois aux limites du désagréable tant chaque son semble avoir été torturé, distordu, étiré et vidé de toute vie. Et pourtant, paradoxalement, au milieu de toute cette froideur et cette rage, on sent une présence, quelque chose de définitivement humain, une négativité et une agressivité trop vive pour être artificielle. Album écrasant et plombant, Melk En Honing tient de l'épreuve de force : sa lenteur, sa lourdeur même, et ses aspects bruitistes peuvent avoir de quoi dissuader. Et pourtant, c'est aussi une oeuvre magistrale, radicale, hypnotique, fascinante et impitoyable qui nous attire de force dans un univers infernal pour nous y broyer longuement, encore et encore.