Agent Side Grinder - 2015-05-12

Agent Side Grinder - 2015-05-12

Cécile Hautefeuille 9 juillet 2015

Le groupe suédois AGENT SIDE GRINDER était en tournée au printemps dernier avec son nouvel album « Alkimia », unanimement salué par la critique à travers toute l'Europe. Le groupe s'est arrêté au plus ancien festival goth, le 24ème Wave Gotik Treffen à Leipzig (De), et nous n'avons pas résisté au plaisir de discuter plus longuement avec ses membres. Johan Lange et Kristoffer Grip nous ont volontiers offert un siège à l'extérieur du luxueux Penta Hotel.

Vous avez joué hier à Leipzig pour votre second Wave Gotik Treffen. Comment c'était ?
Kristoffer Grip & Johan Lange : Super ! En fait, jusqu'ici c'était la meilleure date de la tournée. On a rassemblé plus de 800 personnes. Cela ne nous arrive pas tous les quatre matins. Et la salle était mieux que celle dans laquelle nous avions joué la dernière fois.

Je sais que vous aimez beaucoup FRONT242. N'étiez-vous pas trop déçus de jouer en même temps qu'eux à l'autre bout de Leipzig ?
Kristoffer Grip : Oui, c'est vraiment dommage. J'aurais bien aimé les voir. Il y avait vraiment une grosse compétition hier soir, entre FRONT242, FIELDS OF THE NEPHILIM, SOL INVICTUS... Johan Lange : Évidemment, on aurait adoré être à l'Agra. Mais on les a vus jouer il y a quelques mois à Stockholm, et puis Jean-Luc est un ami.

Vous jouez de plus en plus dans les festivals goth en Europe. Décririez-vous votre musique comme « gothique » ' Pensez-vous appartenir à une scène en particulier ?
Johan Lange : Je dirais plutôt qu'on est un mélange d'indus, de punk, d'electro et de pop. Kristoffer Grip : Je ne dirais pas qu'on est 'gothique', mais le fait est que nous avons du succès dans cette scène. Ce qui est sûr, c'est qu'on est 'dark'. Je crois que c'est le mot qui nous définit le mieux.

Vous êtes souvent surnommés « les nouveaux JOY DIVISION » mais à vrai dire, votre musique contient bien plus que cela. Quelles sont vos réelles influences ?
Johan Lange : NEW ORDER (rires) ! Kristoffer Grip : C'est super d'être comparés à JOY DIVISION, mais c'est aussi un piège. On ne veut pas être comparés à un groupe, on veut créer notre propre son. On aime et on respecte JOY DIVISION, mais on est différents. Johan Lange : Et puis JOY DIVISION, ça n'a pas duré longtemps. Ils n'ont tourné que deux ou trois ans avant de raccrocher. Ils n'ont pas eu le temps de créer beaucoup et de faire évoluer leur musique au cours du temps.

Oui, c'était des pionniers dans ce genre de musique mais votre musique à vous a aussi d'autres influences.
Kristoffer Grip : Exactement. Je suis autant fan de JOY DIVISION que de THE DOORS par exemple. Et personne ne me parle de THE DOORS. Pourtant, ils existaient avant JOY DIVISION. On est un melting pot. C'est ce qui fait que notre musique est unique. Johan Lange : Oui, et je pense que nous avons finalement trouvé un équilibre de toutes ces influences avec 'Alkimia'.

Je crois savoir que les membres du groupe sont arrivés petit à petit. Est-ce que, au début, vous aviez une idée précise du son que vous souhaitiez produire, et du coup vous avez embauché les musiciens dans ce but ' Ou bien vous êtes-vous réunis par hasard et vous avez ensuite expérimenté à tâtons ?
Johan Lange : Au départ, il n'y avait que Peter et moi. On faisait de la musique electro instrumentale. C'était plutôt des petits bouts de musique qu'on mettait de côté. Il nous a fallu deux ans avant d'avoir une idée plus précise de ce qu'on souhaitait faire.

Votre approche de la musique électronique est plutôt vintage. Vous n'utilisez que des synthétiseurs analogiques, un magnétophone Nagra pour créer manuellement des boucles rythmiques et d'autres instruments bizarres. Et surtout aucun ordinateur. Mais le résultat, c'est une musique hautement moderne. Comment avez-vous obtenu ce son ?
Johan Lange : Nous ne sommes pas contre la modernité. La façon dont on enregistre est très moderne. Mais on est tous arrivés avec notre passé musical et on a voulu faire de l'electro mais à notre façon. Kristoffer Grip : Mais on s'est fait un principe de ne pas utiliser d'ordinateur, c'est vrai. C'est important pour nous d'être un groupe organique.

C'est une affirmation très paradoxale. D'habitude, la musique electro est définie comme l'opposé de la musique organique.
Kristoffer Grip : Oui, mais on n'est certainement pas des robots. On tient vraiment à jouer tout en live. On veut créer une sorte d' 'electro vivant', quelque chose d'organique.

En parlant de live, vos concerts amènent une dimension complémentaire à votre musique. C'est toujours très esthétique sans en faire trop. La mise en scène est-elle importante pour vous ?
Kristoffer Grip : Ça a toujours été une priorité pour nous de trouver notre propre dynamique en live. Sans le live, nous ne serions pas là. C'est une interaction directe avec le public et c'est ce qui nous importe. Mais on ne se concerte pas en amont pour savoir qui fait quoi. Chacun a sa façon de jouer sur scène. Johan Lange : On ne veut surtout pas rester derrière un ordi sans bouger. Nos concerts doivent être aussi vivants que l'est notre musique.


Kristoffer, c'est toi qui écris toutes les paroles du groupe. As-tu déjà songé à écrire en suédois ?
Kristoffer Grip : Oui, j'y ai songé... (silence puis rires). En fait j'écris même d'abord en suédois avant de traduire en anglais. Ça peut paraître très cliché de chanter en anglais, mais c'est la langue internationale et je trouve que ça colle bien. Tous mes essais en suédois sont restés inachevés ou partis à la poubelle. J'ai réussi à faire une seule chanson en suédois, sur notre album expérimental 'The Transatlantic Tape Project', mais c'est plutôt un texte parlé que chanté. Johan Lange : Le truc, c'est que le suédois est souvent utilisé pour des trucs comiques, et on ne voudrait pas être comparés à ça. Kristoffer Grip : Oui, je confirme. Ça pourrait nous jouer des tours. Mais il y a de très bons groupes suédois qui chantent en suédois, et je ne suis pas contre l'idée d'écrire en suédois.

Sur votre dernier album, les chansons 'For The Young' et 'Last Rites' sont en featuring avec une bonne amie à vous, Nicole Sabouné. Comment vous est venue l'idée d'ajouter des voix féminines ?
Johan Lange : Je crois simplement que c'était le bon moment. On n'avait encore jamais essayé et on aime bien renouveler notre musique. Kristoffer Grip : Et puis, il fallait une pause au milieu de l'album, entre les chansons sombres et sèches et celles un peu plus pop. Nicole apporte une certaine fraîcheur qui colle parfaitement à l'album. Sa voix se fond naturellement avec notre musique.

Puisque vous parlez de pop, beaucoup de ceux qui vous suivent pour votre côté alternatif étaient très craintifs à l'annonce d'un album plus pop. Pensez-vous que vous avez un public plus large avec 'Alkimia' ?
Kristoffer Grip : Je crois que de plus en plus de gens nous suivent, surtout en Europe. On est un groupe très international. Mais je ne crois pas que cela ait à voir avec nos chansons plus pop. On ne deviendra pas mainstream, ça c'est certain ! Johan Lange : Peut-être que du point de vue de cette scène-là, notre album sonne pop. Mais pour la plupart des gens, on est encore très loin des standards. On ne fait pas ce qu'ils appellent de la « musique normale ». On est toujours perçus comme froids et déprimés.

Vous avez joué cette semaine au Badaboum à Paris. La scène dark est pourtant très confidentielle en France. Quel genre de public avez-vous là-bas ?
Kristoffer Grip & Johan Lange : En fait, le public français est le meilleur que nous avons. C'est pas des blagues. Aujourd'hui, il est composé de gens de toute sorte, mais il a été très loyal tout au long de notre carrière. La France est le pays où nos deux premiers albums ont eu l'accueil le plus chaleureux. Jouer là-bas a toujours une signification particulière pour nous.

Vous faites un crochet par le Wave Gotik Treffen mais vous êtes actuellement en tournée. Quelles sont vos prochaines dates ?
Kristoffer Grip : Là on va à Budapest, puis Lyon, et encore trois autres dates en Suisse, à Saint Gallen, Monthey et Aarau. Johan Lange : Oui, en fait on a notre avion dans une heure et demi.

Il ne me reste plus qu'à vous souhaiter une bonne tournée alors !
Kristoffer Grip & Johan Lange : Merci, c'était un plaisir !