Motocultor 2023 : nos recommandations

Pierre Sopor 10 août 2023

Dans tout pile une semaine commencera l'édition 2023 du Motocultor, le petit festival Breton continuant de grandir année après année. Avec une affiche de plus en plus diversifiée et après s'être aligné sur les gros festivals en proposant quatre jours de festivités l'an dernier, il déménage à Carhaix sur le site des Vieilles Charrues. Son fondateur Yann Le Baraillec nous promettait en interview (à lire par ici) que le festival n'allait pas devenir une énorme machine, du moins pas tout de suite. À quelques jours du début, nous vous proposons nos quelques coups de coeur et petits conseils, les artistes qu'il ne faudra pas rater et ceux qui pourraient vous surprendre. Comme souvent, nos regards ne s'attardent pas vers les sommets de l'affiche, mais on vous partage également quels "grands groupes" nous font saliver d'avance.

La comparaison avec le grand cousin du Hellfest est inévitable : le Motocultor se déroule deux mois après, vaguement dans la même région (histoire de vexer les gens de Loire-Atlantique ET de Bretagne) et, comme le célèbre mastodonte, propose une affiche qui a la bonne idée de s'éloigner du metal pur et dur pour offrir à son public une diversité bienvenue : post-rock, indus... et même un peu de trap seront donc au programme. On continue la comparaison : cette édition 2023 du Motocultor fait revenir plusieurs artistes présents au dernier Hellfest, vous trouverez donc probablement une ou deux similarités avec cet article de l'an dernier.

Amateurs de rock sombre et élégant à la mélancolie écrasante, vous êtes servis : dès le jeudi 17, A.A Williams viendra vous hanter avec les titres plus lourds de son dernier album qui nous avait fait très fort effet. Le lendemain, bien que les Togolais d'Arka'n Asrafokor piquent notre curiosité, nous irons nous recueillir devant la performance cathartique de Gggolddd et son mélange de post-rock, post-punk, trip-hop, doom, metal extrême, pop-rock, bref, vous avez saisi l'idée : les Néerlandais jouent avec les étiquettes pour mieux nous bouleverser. There Shame Should Not Be Mine sorti l'an dernier (chronique), plus minimaliste et électronique que d'habitude, était le plus bel album de 2022 (avec celui de Brutus, ok). Le samedi 19, ce sera d'ailleurs au tour des Belges de venir présenter leur merveilleux Unison Life (chronique), plus bel album sorti l'an dernier (avec celui de Gggolddd, ok) : énergie, spleen, lourdeur et introspection seront au rendez-vous. Après toutes ces émotions, dimanche, Messa et son doom ésotérique vous offrira un voyage moins bouleversant mais plein de mystères.

Du côté des curiosités, on ne répètera jamais à quel point Lili Refrain est une artiste à découvrir ab-so-lu-ment. Son premier album, Mana (chronique), était un superbe mélange de metal progressif, de world music, de darkwave et tout un tas de choses allant de Tool à Bauhaus en passant par Dead Can Dance. Seule sur scène, ses lives ont des airs de rituel hypnotiques captivants. On est également très agréablement surpris de voir le festival s'ouvrir aux mélanges trap-metal-indus et on a hâte de voir ce que PØGØ (où l'on retrouve le chanteur de Horskh) et son univers cyberpunk donne sur scène. Ça promet une belle énergie. Beaucoup plus connus, Ic3peak conclura la soirée du 18 avec son mélange trap-metal-dark electro- comptines folkloriques. En live, Ic3peak ne sourit pas, ne manifeste pas d'émotion, mais si le rendu en festival est aussi puissant qu'en salles (l'an dernier, c'était incroyable), alors ça promet de beaux cauchemars. Enfin, si vous n'avez pas envie de rôtir devant Watain, que vous avez probablement déjà vu 666 fois, Scarlxrd viendra hurler ses tripes le samedi 19. Rien que pour emmerder les puristes, on y sera. Enfin, parce qu'on ne sait pas trop où les ranger, on ne saurait trop vous recommander de voir Health : le trio californien et son indus introspectif mélange poésie et grosses basses dans un univers cyberpunk futuriste tout en lourdeur et poésie.

Si vous êtes en quête de grosse claque méchante, de rouleau compresseur irrésistible, Zeal & Ardor et son mélange entre blues et metal extrême gagne en live une puissance impressionnante malgré un jeu de scène réduit au strict minimum. Les français d'Hypno5e vous offriront vendredi après-midi une traversée mouvementée entre violents orages et errances oniriques inspirées par des paysages dévastés de la Bolivie, ce sera aussi violent que poétique... Mais c'est surtout sur le samedi 19 et la venue d'Amenra que nos yeux sont tournés. En live, Amenra broie notre âme pour mieux l'élever avec un show tétanisant entre catharsis et messe sacrée, sans concession. Ce sera probablement le concert le plus puissant du festival, vous êtes prévenus.

Si vous aimez vous perdre dans vos rêveries ou que vous avez juste besoin de souffler, Lost in Kiev et Long Distance Calling vous offriront une belle dose de post-rock cinématographique de très grande classe. Si à l'inverse, vous voulez danser et vous déguiser en trucs tribaux, Hrafngrimr et Uuhai vous proposeront de bonnes alternatives aux folkeries de Heilung ou The Hu, en attendant Wardruna. Et si vous voulez danser comme des neuneus (on ne juge pas, il est probable que l'on y soit aussi), les japonaises d'Hanabie seront l'anti-Wardruna par excellence avec leur bazar criard et bariolé auquel on n'est pas sûr de comprendre grand chose (la comparaison avec Babymetal sera aussi inévitable qu'injuste). Si vous aimez ne rien comprendre et faire les débiles, Little Big sera là pour prouver qu'ils savent faire autre chose que des vidéos absurdes qui génèrent du buzz. Carpenter Brut fermera le festival en vous trimballant dans son univers retro kitsch qui a gagné récemment une lourdeur et une violence nouvelle donnant une teinte metal indus plus énervée à sa synthwave, une touche qui nous parle forcément.

Voilà. on vous a pointé quelques curiosités, partagé nos grosses attentes, et on a essayé de vous proposer de quoi faire la fête comme des petits fous rigolos, vous faire laminer par des tempêtes d'émotions, déprimer, souffler, ou agacer les grincheux qui diront "baeuuh, c'est même pu un vrai festoche métol". Alors faites-nous plaisir : piocher dans tout ça un truc ou deux que vous ne connaissez pas et allez les découvrir. Promis, vous ne le regretterez pas.