Chronique | Wumpscut - Fledermavs :303:

Tanz Mitth'Laibach 24 mai 2021

Nous avions eu plusieurs occasions de le dire dans ces colonnes : :WUMPSCUT:, sur la fin, ce n'était plus trop ça. L'artiste allemand avait pourtant été un pilier de la dark electro dans les années 90 ; il nous avait entraînés dans une danse macabre avec Music For A Slaughtering Tribe, effrayés avec les atmosphères dérangeantes de Bunkertor 7, glacés avec l'hivernal Wreath of Barbs, pour ne citer que ceux-là. Il avait poursuivi la production d'albums à un rythme effréné, mais se faisant de plus en plus redondant et de moins en moins sombre, jusqu'à ce que Rudy Ratzinger annonce finalement la fin de son projet en 2017. Le voilà qui renaît pourtant de ses cendres avec cet album Fledermavs :303: ; peut-être cette coupure lui a-t-elle fait du bien ? Vite, allons écouter ça !

On a en tout cas plaisir à retrouver ces boucles électroniques répétitives d'inspiration industrielle, ces nappes de synthétiseur glacées, ces battements technoïdes qui prennent soin de ne jamais trop en faire, le tout comme toujours entrecoupés de samples qui semblent pour la plupart extraits de films. Cette atmosphère très froide, détachée, comme indifférente à l'humanité exprimée par les voix des samples, a de quoi nous mettre mal à l'aise. Tant mieux : c'est ce qu'on attend de :WUMPSCUT:. Comme la plupart de ses productions, Fledermavs :303: reste la plupart du temps sur des rythmes lents, contrairement aux débuts du projet qui évoquaient davantage l'EBM, distillant une horreur latente.

Tout ceci est certes agréable, du moins ça l'est à condition d'aimer les ambiances malsaines de la dark electro, néanmoins on n'échappe pas à l'impression de tourner en rond. De tourner en rond au sein même de l'album, pour commencer : les samples de dialogues servis à toutes les sauces cessent rapidement de nous surprendre, et les compositions demeurent figées dans un statu quo frustrant, toujours inquiétantes mais sans jamais basculer dans la folie comme :WUMPSCUT: a pu le faire autrefois sur des morceaux tels que le magnifique Black Death (French Concept). :WUMPSCUT: nous met mal à l'aise mais ne nous traumatise plus ; on apprécie l'écoute mais on sait que l'on pourra l'oublier, contrairement à ce qu'il a pu faire jusqu'à l'album Bone Peeler de 2004 inclus -encore que celui-ci était déjà plus inégal. Surtout, on a l'impression que, encore une fois, :WUMPSCUT: tourne en rond d'un album à l'autre ; ce nouvel opus n'apporte rien qui n'ait été déjà présent sur ses albums précédents.

Il y a bien des morceaux efficaces : on retient particulièrement Tod Durch Affen, le plus entraînant avec son EBM implacable façon Music For A Slaughtering Tribe, ainsi que Little Wartz où le sample de voix enfantine peut rappeler le glauque morceau Our Fatal Longing ; cependant, cela donne par-dessus tout envie de retourner écouter les originaux !

C'est bien dommage pour cet album qui serait tout à fait sympathique si on ne connaissait pas :WUMPSCUT: mais il va falloir se faire une raison : même cette coupure de plus de trois ans, ce qui est relativement long comparé au rythme habituel de production de l'artiste, n'a pas suffi à rendre son mordant au projet dark electro. C'est toujours une bonne chose qu'un artiste ait de nouveau envie de composer, toutefois le fait est que ces dernières compositions restent anecdotiques ; tant pis, cela n'ôte rien à notre reconnaissance pour tout ce que nous a apportés Rudy Ratzinger.