Chronique | Wumpscut - Body Census

Pierre Sopor 10 avril 2007

Gros challenge pour Rudy Ratzinger, pape de l'electro-dark allemande : prouver avec Body Census qu'il est toujours capable de bien faire et que les déceptions précédentes sur Cannibal Anthem, Bone Peeler et Evoke ne marquaient qu'une faiblesse passagère. Mettons fin au suspens : Body Census est une réussite (presque) pas trop mitigée, qui rappellera (presque) la violence qui caractérisait les WUMPSCUT de la décennie précédente. Tout en laissant un goût étrange dans la bouche ... En effet, si WUMPSCUT est très productif et sort un disque par an depuis ses débuts, on peut aussi dire sans trop se mouiller que la qualité n'était plus vraiment au rendez-vous ces dernières années. A croire que Ratzinger avait perdu son agressivité et sa puissance, que ses productions étaient devenues mornes et molles. Et c'est donc dans ce contexte de crainte de déception qu'arrive Body Census, un retour vers quelque chose de plus sombre, plus torturé, plus violent, plus direct. On voulait que WUMPSCUT saigne. Et le nouveau WUMPSCUT saignouillera. Enfin, pas tout à fait suffisamment. Si Body Census nous re-propose enfin une ambiance bien macabre, avec enfin une voix distordue comme on en attendait et un retour à un son plus martelé, plus martial, un bon son qui rentre dedans, il comporte quand même de grosses faiblesses. L'album a de très bons titres, comme The Beast Sleeps Within You, We Believe, We Believe, ou Homo Gothikus Industrialis, véritable hommage à son public. Mais hélas, certains paraissent quelconques. Le défaut de l'album n'est pas d'être mauvais, plutôt l'impression qu'à force de sortir un disque par an, Ratzinger manque d'inspiration et fini par sortir des dérivés de ce qu'il a déjà fait, des ersatz moins intéressants, moins puissants. On pourrait même pousser jusqu'à dire que certains titres de chansons semblent plus parodiques qu'autre chose : You're A Goth ou My Dear Ghoul, pourtant musicalement intéressantes. Body Census reste néanmoins une passionnante exploration du mal et de la souffrance physique et mentale, thème cher à Rudy Ratzinger et parfaitement illustré par l'artwork de l'album. Nous retrouvons aussi la voix de Onca, déjà présente sur le dernier album Cannibal Anthem. Cette fois-ci, ce n'est que sur un seul titre, The Fall. Quand on sait que la plupart des fans n'avaient que très peu apprécié cet apport sur le précédent opus, on peut se demander pourquoi Ratzinger l'a gardé... Ou regretter qu'il n'ait pas plus assumé ce choix ! Même si le résultat n'est pas mauvais, le coté popesque mou tranche vraiment avec l'ambiance lourde, plombée et macabre que Body Census avait su imposer malgré tout. Le repos et la sensation de calme qu'elle apporte n'étaient pas forcément les bienvenus. Avec des effets plus dépouillés et brutaux et un chant plus menaçant, ce nouveau WUMPSCUT réussi à faire renaître quelques espoirs. Ça saigne, les dents crissent, ça sent la torture et la mort. Mais c'est bien la moindre des choses venant de WUMPSCUT. On attendait qu'il nous laisse une impression malsaine, un goût amer de sang. On gardera sûrement l'amertume du goût, mais pas pour les mêmes raisons.