Chronique | Kamizol-K - Awakening

Spoon 6 mai 2018

Nombreux groupes de metalcore tentent de percer sans vraiment arriver à se démarquer, faute d'avoir quelque chose de vraiment accrocheur à proposer ou tout simplement parce que la tendance actuelle est au djent. Fini l'âge d'or des SONIC SYNDICATE, KILLSWITCH ENGAGE, TRIVIUM et autres grosses productions qui occupaient une grande place sur la scène metal d'avant 2010 et pourtant… d'irréductibles français tels que BETRAYING THE MARTYRS, BLACK BOMB A ou L'ESPRIT DU CLAN continuent encore de tourner régulièrement sur le territoire tricolore, laissant peu de place aux nouvelles formations qui voudraient jouer des épaules pour se faire une place.

Parmi elles : KAMIZOL-K. Groupe lyonnais formé en 2015, le sextet arrive avec son premier EP Awakening et compte bien se faire un nom sur la scène française avec une fusion metal, thrash et hardcore mais avec la particularité d'un duo vocal masculin et féminin. Alors, est-ce les dauphinois ont une chance de s'imposer ? Oh que oui !

Ce qui frappe le plus à la première écoute, c'est l'énergie dégagé par le groupe et cela se ressent même en studio. Déjà, le titre d'ouverture qu'est Watch Out nous choppe par le col pour nous emmener dans la fosse. On est dès le début sur du gros hardcore nerveux et rythmé mais surtout très vif et puissant. Dans la même lignée des parpaings surprises on retrouve Sinner qui sort de nulle part un riff très énergique donnant envie de sauter partout entre deux blasts. Qui dit HxC mentionne obligatoirement breakdown et là, attention. La présence de ces derniers reste subtile mais efficace. Ils sont loin d'être mous et ne se cachent pas derrière la batterie ; les guitares restent suffisamment présentes pour ne pas qu'on s'y ennuie. Pogoteurs et mosheurs peuvent ainsi se mettre joyeusement sur la tronche sans que l'un des deux camps y soit lésé.

Mais un passage frénétique est d'autant plus apprécié quand celui-ci est annoncé. Les temporisations sont ainsi positionnées intelligemment telles le calme avant la tempête, notamment avant le pont final. En effet, la grosse facture de KAMIZOL-K réside dans leurs outros. On ne pourra pas le leur enlever, mais ils savent conclure leurs chansons dans la violence. Reprenons Watch Out avec son déferlement de gros riffs tempérés par la guitare solo, ou encore Betrayer qui balance littéralement des parpaings dans le tas sur son final instrumental, lourd et explosif. De son côté, celui de Sinner est lourd et brutal même si la guitare soliste paraît un peu trop timide. Si elle se lâchait avec un solo puissant, sans pour autant être technique, le final aurait été sublimé si la section avait été un chouia plus longue ou bien plus explosive.

On reprochera néanmoins un raté sur Betrayer, où la temporisation est trop longue pour finalement rater le coche qui ne sera pas rattrapé par le soliste qui manquera également de puissance cette fois-ci. Ce sont d'ailleurs ces titres annoncés comme étant orientés metal qui sont les plus faibles de l'album. DLC est moins entraînante que ses comparses avec notamment en premier lieu un grunt mollasson qui n'est clairement pas le chant de prédilection du chanteur. Malgré une batterie qui frappe fort, très fort – le batteur doit y mettre de tout son poids par moments à tel point que la percussion vient occulter les cordes – pour garder l'ensemble énergique, le titre n'arrive pas à décoller.

De son côté, Betrayer, qui commençait clairement sur du metal avec ses riffs serrés et rapides emprunts du black, est vite rattrapé par le son core sur lequel s'est imprégné KAMIZOL-K, qui est notamment marqué par la seconde moitié et les chœurs traditionnels indissociables au HxC. A cette image vient s'inscrire 69 Forces qui démarre avec du gros death metal mais dont le titre change rapidement de bord. C'est intéressant de vouloir élargir les horizons mais au stade actuel, ce n'est pas encore tout à fait transcendant pour être relevé.

Il reste Running Dead dont on a pas encore parlé, parce que le ressenti est mitigé. Malgré une grosse intro terriblement efficace et fracassante, le couplet arrive malheureusement comme un mur et stoppe net l'enthousiasme. Des frustrations il y en a eu, mais des comme celle-là c'est de la spoliation. Les trente premières secondes étaient d'une parfaite symbiose de fluidité et brutalité ! Heureusement la cadence repart de plus belle un peu plus loin – malgré un deuxième mur tout aussi brutal – mais c'est dommage d'assassiner un tel entrain de la sorte surtout que la seconde moitié est un orgasme pour la nuque.

En dehors de tout cela, ce qu'il faut retenir de KAMIZOL-K est que c'est un groupe très prometteur qui rentre dans le Jésu avec beaucoup d'énergie à revendre. Il va bien falloir assurer la relève d'un  metalcore français vieillissant – THE ARRS ayant déjà cédé le flambeau – mais pour cela il est nécessaire d'exploiter davantage la dualité vocale en appuyant sur les forces de chacun, afin de reprendre là où CHAPTER HATE s'était arrêté.