Chronique | Haex - Aethyr Abyss Void

Pierre Sopor 22 décembre 2021

Cela faisait quelques temps qu'on avait HAEX dans le collimateur : le duo d'indus ésotérique californien a pris le temps pour sortir ce premier album, l'annonçant déjà il y a bientôt trois ans, nous faisant mariner avec seulement quelques remixes et morceaux isolés à nous mettre sous la dent; Tant mieux, il fallait laisser à Adam V. Jones et  Sarah Graves le temps de peaufiner leur petit monstre.

HAEX va donc chercher le mystique dans les machines, dont les boucles répétitives se prêtent bien sûr aux effets hypnotiques et rituels, instaurant son ambiance cyberpunk et nihiliste. Aethyr Abyss Void vise la jugulaire d'entrée avec Cursebreaker : c'est agressif et mordant, quelques riffs ajoutent une pesanteur bien méchante, lorgnant plus du côté du metal industriel à la 3TEETH (dont HAEX pourrait bien être un petit frère, plus electro, plus obscur, mais tout aussi moustachu) que du ritual noise opaque et incantatoire. Les titres les plus anciens (Daggers, Bloodtoll) ont, dans leur minimalisme et leurs récurrences cycliques, quelque chose qui tient presque de l'intensité tribale. L'ambiance est sinistre, la menace étant parfois contenue lors de passages plus contemplatifs (Sex Magick), parfois plus explicite et directe le temps de poids lourds qui cognent fort (Cvrtain, Leviathan). On apprécie la texture qu'à tout cela, son côté à la fois accessible et suffisamment soigné pour dégager ce qu'il faut de mystère, la lourdeur de ce qui évoque un futur forcément écrasant, noir, apocalyptique (Feast for Death), la qualité des ambiances (Divine Masculine) et, bien sûr, ces grosses pulsations bourrines qui donnent envie de remuer dans un sous-sol insalubre.

Avec Aethyr Abyss Void, HAEX prouve son potentiel : le metal industriel s’accommode bien de ces univers ésotériques tout en symboles inquiétants et psychés tourmentées par le synthétique, l'automatisé et le déshumanisé que l'on épie en quête d'âme. Le duo a de quoi capter notre intérêt et le retenir. Si les concerts suivent, ce qu'on leur souhaite, on veut bien parier que ces deux-là vont gagner quelques nouveaux adeptes rapidement.