Chronique | Gaahls Wyrd - GastiR - Ghosts Invited

Pierre Sopor 25 mai 2019

Peu de temps après avoir laissé tomber l'aventure GOD SEED, Gaahl (ex-GORGOROTH, passé également chez WARDRUNA) se lançait dans un nouveau projet, GAAHLS WYRD, histoire de retrouver la liberté et la flamme qui l'anime dès qu'il est question de prendre des risques. Quatre ans plus tard, un premier album voit enfin le jour, même si, à la manière de GOD SEED, plusieurs concerts et un EP live étaient venus tester la solidité de la formule avant ça.

GastiR - Ghosts Invited est donc un album attendu de pied ferme sans réelle crainte : on a eu le temps d'éprouver la richesse de ce que propose GAAHLS WYRD, et cet album vient surtout concrétiser tout le bien que l'on en pense. Gaahl aime s'affranchir des codes et toucher à tout, c'est une des principales forces de ce premier album : il est imprévisible. Dès Ek Erilar, avec sa voix menaçante, ses riffs furieux et sa batterie impitoyable qui lancent le morceau, l'ambiance hantée du disque saisit l'auditeur et nous transporte dans un univers sombre et inquiétant. Chœurs mystiques, cris lointains... On est quelque-part entre le black atmosphérique et le metal gothique, lourd et menaçant, jusqu'à un final glaçant tout en nappes ambiantes. 

Gaahl propose avec GastiR - Ghosts Invited une sorte de synthèse de tout ce à quoi il a pu toucher au cours de sa carrière, illustrant avec finesse son refus de la facilité. Au rythme conquérant de From the Spear succèdent les surprenantes Ghosts Invited et Carving the Voices sur lesquelles il laisse sa voix claire et grave s'exprimer avec des airs de Peter Murphy ou de David Bowie flagrants. Carving the Voices synthétise tout particulièrement l'élégance de l'album, sa richesse et son fantastique macabre. Veizta Hve vient d'ailleurs appuyer cet aspect mystique et rituel en scandant les vers du poème runique Hávamál. Même si l'album contient ce qu'il faut de furie pour satisfaire les amateurs de metal extrême, ce sont au final ces parties plus ambiantes qui en font toute la saveur, quand la musique devient incantation comme lors de ce fantomatique final, Within the Voice of Existence. Murmures, mélodies répétitives, percussions hypnotiques, son de métronome : la première moitié du morceau a presque un effet psychotrope avant un final grandiloquent et théâtral en forme d'invocation.

GastiR - Ghosts Invited est un album qui surprend par sa subtilité, ses forces principales étant certes sa liberté créative mais surtout son atmosphère particulièrement réussie digne d'un film d'horreur gothique. On espère que GAAHLS WYRD sera amené à avoir une carrière plus longue que les précédentes expériences de Gaahl, mais tant qu'il y trouvera la possibilité de s'exprimer comme il l'entend, ça devrait aller. En fait, le vrai soucis de ce premier album est de sortir fin mai, tant il se prête aux froides nuits d'hiver. Vivement que l'été passe, histoire d'aller l'éprouver au milieu d'arbres morts et de  mélancoliques spectres invisibles.