Chronique | BΛNMΛSKIM - BLINDATA

VerdamMnis 5 mars 2018 U+06e9

Cela fait à présent quelques années que BΛNMΛSKIM laisse sa trace sur divers albums et compilations. S’étant tout d’abord fait connaitre pour ses productions, c’est par sa voix qu’elle s’est imposée depuis sur la scène witch house, avec un impressionnant éventail de collaborations (avec FLESH, BrickzCivilisation, SEMICOLOŊ ou encore ßęđŧīmĕ Šŧōŗĩėş, et plus récemment D3AD3MOT3 entre autres). Sa discographie personnelle demeure cependant une des plus particulière du genre, son bandcamp faisant peau neuve (albums compris) à pratiquement chaque nouvelle sortie. À l’heure actuelle, n’y figurent que deux sorties, FIREICE, sorte de recueil de toutes ses productions passées sortie sous son égide (n’incluant pas les featurings, et certaines collaborations par exemple), et donc BLINDATA, nouvel album, qui nous intéresse ici.

Pour les gens déjà habitués au son très particulier de notre maitresse de cérémonie, ce qui suit ne sera pas une surprise, pour les petits nouveaux ou ceux qui dormaient au fond : influence techno au programme, ça fait boom boom, ça sature, les voix sont trafiquées dans tous les sens ou passées au filtre « cassette » (dans le genre des enregistrement pirates, pour ceux qui ont connus les walkmans), et bien sûr, c’est dark, ça parle d’amour, de gens morts et de drogues.

L’album s’ouvre donc sur un hoover synth aux allures de son rave un peu instable, tandis que la voix de BΛNMΛSKIM nous berce de ses paroles : « You know what it burns It's called love but hurts It's like hold a rose by thorns It's like living into a storm », on comprend que ça va être à la fois beau, jouissif, et en même temps bien sale et intense. S’en suit le diptyque H et H (long trip), double balade poétique (la version longue s’agrémentant de beats inversés en guise de conclusion) s’il en est, teintée d’une certaine mélancolie, envoutante et perturbante à la fois. La conclusion vocale à cette double dose « but this passion bothered him, he said, heroin was a lover better than him, better than me » nous fait bien comprendre que c’était le but recherché (et que le H au passage était l’acronyme de Heroin).
Where Will I Go fait office d’interlude plus classique dans la forme, porté par une voix beaucoup plus présente, pour un résultat qu’on pourrait rapprocher du travail de OKKVLT KΛTT ou de HERE†HEYCOME. La piste s'enchaine avec la bien plus techno Heart Shaped Knife, qui nous fait comprendre qu’on passe à présent aux choses sérieuses. Le titre annonce d’emblée la couleur, le morceau tranchant tout en douceur (on imagine bien la douceur dans ce genre de contexte) dans le vif du sujet. La piste suivante marque un retour à une sensualité plus propre et sonne comme un dernier instant de répit avant un final que l’artiste nous annonce comme tragique « And we live in terror, touching the storms like we're not afraid of And we love each other, it's an extreme empathic love And in the end we got an terrible end Holding our hands tight until our lives are over ».

Dernier acte, et là on ne rigole plus, avec le morceau le plus violent de l’album (Revenge), qui semble tout droit sorti de l’esprit tordu de ATILLA THE HVN, l’option dansante à la fin en plus. S’en suit une piste interlude jouant de dissonance et de gros kicks bien gras, seul morceau sans voix, comme pour nous rappeler que BΛNMΛSKIM est avant tout une productrice de talent, avant d’achever sur un Regeneration dont le lancinant « Embracing death is embracing eternity » nous amène à la conclusion qui nous était promise, nous tendant le bras comme pour la rejoindre dans un enfer de carillons et de hoover synths.

Pour conclure, BLINDATA est un album tout en finesse malgré son apparence brute de décoffrage. Rien n’est écrit au hasard, tout à un sens (à lire entre les lignes, les paroles étant postées sur son bandcamp), et la production, foisonnante de détails amène son lot de découverte à chaque écoute, démontrant le talent de BΛNMΛSKIM autant dans la production que dans le chant, son habilité à distiller un son à la fois unique et empruntant à diverses influences pour en faire son style propre, entre witch house et techno, entre amour et violence, entre la vie et la mort.