"Merci d'être venus nous voir parce qu'on pensait qu'il n'y aurait personne et en fait vous êtes tous arrivés en même temps"... à force, ça va finir par se savoir : Une Vraie Gothique, c'est trop cool et c'est à découvrir de toute urgence (pour vous aider, notre interview fleuve du début de l'été pourrait vous aider à vous familiariser avec l'univers et la démarche). Le duo dark electro / EBM composé d'Ulrika et Ferdinand plongeait dans les ténèbres la scène déjà pas franchement lumineuse de l'Atomic Cat, incontournable point de chute pour les amateurs de choses obscures qui nous aidait à supporter l'été en proposant chaque week-end de chouettes concerts et DJ sets gratuits.
Une Vraie Gothique, c'est trop cool pour tout un tas de raisons. Déjà, c'est un truc de vraies gothiques. On ne rigole pas, là, attention : on parle du Diable, de vampires, de cimetières, d'incantations démoniaques, de sang noir et tout ça ! Ou plutôt, si, on rigole, mais on le fait avec le plus grand sérieux. Une Vraie Gothique prend une place bien particulière dans nos cœurs avec son attitude à la frontière entre parodie et premier degré ultra-assumé : il y a de l'auto-dérision envers notre quête éternelle de choses toujours plus sombres, bien sûr, mais pas de moqueries. La démarche est pleine de tendresse mais a aussi quelque chose de cathartique : ouais, on est entre nous, on sait qu'on peut rigoler de tous nos selfies dans les cimetières, de la fois où, horrifié, on a regardé La Reine des Damnés pour la première fois ou découvert l'absinthe. Dans la brume de l'Atomic Cat, les silhouettes spectrales qui remuent dans le public au milieu de la déco du bar nous plongent tout droit dans un film des années 90 à la D.A. gothique ou dans le jeu vidéo Vampire the Masquerade : Bloodlines. On rigole, mais on est aussi très heureux de pouvoir l'assumer, le brandir avec une forme de fierté : oui, les gros clichés, c'est trop bien !
Mais Une Vraie Gothique, c'est aussi (et surtout) trop cool pour la musique. Le duo essaye plusieurs choses, tâtonne, mais surtout embrasse un large spectre de musiques, entre dark electro, EBM, darksynth, avec quelques grosses guitares synthétisées et des parties quasi rappées (on a hâte de voir le clip de Chasse Aux Sorcières, avec Supershotgun en guest, et ses lignes débordant de testostérones : le résultat s'annonce réjouissant !). Sur scène, le concert se décline en petites scénettes, chaque morceau étant presque une mini pièce de théâtre racontant une interaction entre Ulrika la sorcière et Ferdinand. Elle s'exprime en allemand, y compris entre les morceaux, lui parle français. Le mélange permet de jouer avec les musicalités différentes des deux langues mais aussi de nous offrir une introduction facile à l'univers car on comprend facilement ce dont il est question. Les regards sont intenses, graves, et les moues boudeuses ne se brisent que pour laisser éclater des rires démoniaques.
Sous le bas plafond de l'Atomic Cat, Une Vraie Gothique enchaîne alors ses punchlines et histoires faites d'errances macabres, de sortilèges inquiétants et de questionnements adolescents. On aime leurs facéties, on aime les rythmiques qui donnent envie de se dandiner, on aime les mélodies simples qui restent en tête, on aime cette sincérité qui pointe entre deux clins d’œil, on aime cette poésie bien particulière où se mélangent images fantastiques (les vampires, les sorcières, la mort, tout ça) et trivialités du quotidien (un pigeon mort dans le caniveau, si dark, ou ce morceau nommé Derrière la Médiathèque). Une Vraie Gothique dédie RDV Au Cimetière aux bébés bizarres et aux ados gothiques que nous avons été et serions encore, si seulement nous l'osions. Ferdinand roule des mécaniques, met des lunettes noires pour parler d'EBM (et oublie de les enlever ensuite) pendant qu'Ulrika rit comme une démente sous les spots, leurs personnages sont bien caractérisés, à la fois attachants et identifiables. Bonus non négligeable : avec son fanzine et ses cartes postales homemade, Une Vraie Gothique propose un stand de merch aussi réjouissant que sa musique !
On le savait en les découvrant, on en a (encore) la confirmation : Une Vraie Gothique est un projet immédiatement sympathique et profondément jouissif. Le duo a tout le potentiel pour se faire une place bien particulière, celle d'un plaisir un brin régressif et "communautaire" tout en ouvrant très grand les frontières dans une démarche bienveillante : même si t'as pas lu tous les D-Side, même si t'étais pas là "à l'époque" (tu sais, celle avant, celle qui était mieux), tu as aussi le droit d'être une vraie gothique ! Ça ne pourrait pas fonctionner si ce n'était que ça, mais la proposition musicale fonctionne et la théâtralité du show en font aussi un projet tout à fait crédible, sérieux et bien foutu que l'on a carrément le droit de juste kiffer au plus pure premier degré. De toute façon, au-dessus d'un degré, nos peaux risqueraient de bronzer et ce serait insupportable. Alors on trépigne d'impatience car nous devrions avoir de leurs nouvelles cet automne avec, on l'espère, de nouvelles choses à écouter et enfin un premier EP qui s'apprête à sortir de son tombeau pour nous hanter toute la morne saison.
En attendant, rendez-vous à nouveau le 3 septembre à ce même Atomic Cat dans le cadre du Cabaret Chimérique (on nous promet des surprises) et le 20 novembre en première partie de JE T'AIME au Supersonic Records.
