Motocultor 2025 : nos recommandations

Pierre Sopor 6 août 2025

L'édition 2025 du Motocultor approche. Du 14 au 17 août, le célèbre festival se tiendra de nouveau à Carhaix et proposera une affiche de nouveau très riche et ambitieuse. Pour toutes les informations sur le festival, vous pouvez visiter son site officiel.

Nous vous proposons quelques petits conseils maison avec un petit focus sur quelques coups de cœur de cette programmation (côté cœurs brisés, on ne s'est pas encore remis des annulations au fil des mois de Hangman's Chair, Ho99o9 et, pour des raisons plus tragiques, de Dropout Kings). Vous nous connaissez (peut-être) : il est fort probable que l'on vous envoie vers les sombres bizarreries de cette édition 2025 plus que vers les classiques de la scène metal... que les plus curieux nous suivent, à leurs risques et périls !

Jeudi 14 août

Oubliez l'installation au camping en arrivant. Balancez votre tente, vous finirez de nuit, dans le noir, avec plein de gens complètement saouls qui braillent des reprises de Carlos ou Julien Clerc en titubant. Votre priorité sera de pouvoir faire la queue assez tôt pour ne pas rater le début du festival ! Versatile joue à 16h et il ne faudra absolument pas rater le groupe de black metal industriel, alors foncez faire la queue tôt pour entrer à temps ! Avec leur univers horrifique théâtral et leurs visuels saisissants, les Suisses feront sans aucun doute partie des shows mémorables de ce premier jour ! Soyez laids, soyez grotesques, bref, venez comme vous êtes !

Il y a une discussion profonde et spirituelle que vous pourrez avoir avec vos voisins de camping pendant que vous vous battrez avec votre tente, dans le noir, à 3h du matin, à maudire ce "fichu site et son nom pas possible et ses conseils débiles" : est-ce que la Pologne est le nouveau Far-West ? On ne dit pas ça (uniquement) pour le virages très conservateur et bigot du pays lors de ses dernières élections présidentielles... Après tout, il y a un bison sur les bouteilles de vodka Żubrówka (vous le saviez, vous, qu'il y avait des bisons en Pologne ?) ! Mais ce n'est pas tout ! Adam "Nergal" Darski, monsieur Behemoth, viendra jouer au cow-boy avec Me and That Man, son projet blues / country / folk avec lequel il frime derrière des lunettes noires en vous faisant taper dans vos mains. Et puis si jamais vous aimez les westerns à Carhaix, vous irez voir Wayfarer le lendemain et son mélange entre black metal et americana !

Parmi les surprises de cette édition 2025, Nailbomb excite forcément tout particulièrement notre curiosité. En 1994, Max Cavalera et Alex Newport sortait un album hargneux et rugueux mélangeant metal industriel et thrash metal, croisement mutant entre Ministry, Slayer... et bien sûr Sepultura que l'on devine dans quelques percussions tribales. Un unique album sort, suivi d'un live l'année suivante titré Proud To Commit Commercial Suicide. Tout un programme. Nailbomb refusait de diluer sa rage et de s'auto-parodier, le projet n'était donc voué à aucun avenir. Trente ans plus tard, Nailbomb ressuscite sur scène. Est-ce que ce sera aussi bien qu'il y a trente ans ? Pour le savoir, il faudra assister à cette date unique en France !

Vous n'avez pas besoin de nous pour dire que Magma, attendu et repoussé depuis un moment au Motoc, ou Mogwai, c'est la classe. En revanche, vous espérez peut-être que l'on vous aide avec ce cruel dilemme de minuit : DOOL ou Samael ? Eh bien, débrouillez-vous, nous sommes nous-même déchirés entre d'un côté le rock sombre, romantique, mélancolique et viscéral de DOOL et de l'autre la formation black metal / indus suisse culte. Poésie cathartique d'un côté, hymnes ténébreux de l'autre... Il vous reste une semaine pour réussir à vous cloner. Bonne chance.

Vendredi 15 août

Si vous avez vu DOOL la veille, que vous êtes un peu en boule après avoir passé la nuit à essayer de dresser votre tente dans le noir, que vous avez des cernes de goule et que vous voulez un truc cool, un truc qui roule, alors foncez voir Houle ! Habillés pour la pêche aux moules-moules-moules, les loups de mer sur scène vous donneront envie d'y retourner, maman, et on s'en fout si les gens de la ville-ville-ville vous prennent le panier. Avec Houle, les paniers, on les explose. Leur black metal chargé de tempêtes océaniques vous rafraichira et vous secouera dans tous les sens pendant que, en vain, vous essayerez de suivre du regard la tornade qu'est leur chanteuse Adèle, alias Adsagsona. Il va y avoir des vagues.

L'après-midi du vendredi sera cuivré. Parfait pour s'acclimater aux hybridations metal et jazz avant le show d'Imperial Triumphant une heure et demi plus tard, Five the Hierophant mise plus sur un doom mystérieux et hypnotique que les dissonances avant-gardistes. Ensuite, bien sûr, vous irez voir Imperial Triumphant. Si vous faites déjà partie du culte, vous serez aux anges. Si vous n'avez jamais été initié, vous allez nous maudire. Pour vous consoler, entre les deux, allez donc voir Wayfarer et ses cowboys qui font du black metal qui sent la santiag, sans non plus virer à la caricature ! 

Après Myrkur l'an dernier, le Motocultor invite cette année une nouvelle reine nordique pour refroidir l'atmosphère en soirée. Venue des Îles Féroé, Eivør a elle aussi de solides arguments pour dénoter dans le contexte d'un festival metal. Entre folk, electro et pop, sa prestation poétique et éthérée vous permettra de souffler et de guérir les bobos que vous vous serez faits en allant vous rouler par terre avec des animaux torses-nus pendant Rectal Smegma. Il fallait nous écouter et aller voir Five the Hierophant ! La Bruce Dickinscène étant désormais à l’entrée du site, le barouf que fera Kerry King en même temps à l'autre bout du festival ne devraît pas trop parasiter le son. On espère y croiser plein de métalleux un peu paumés et alcoolisés qui feront la gueule en se demandant ce que c'est que ces conneries, et surtout, où qu'c'est qu'il est le gars de Slayer (oui, toi, le mec qui titubait pendant Ic3peak en demandant "c'est quoi cette merde, c'est des Suédois ? C'est d'la merde !" en 2023, si tu te reconnais, on espère te recroiser toujours aussi en forme !).

Nous, ici, on est sombres. On aime quand ça sent le caveau. Les Suédois de Tribulation offriront au Motocultor sa parenthèse la plus gothique. Depuis leur dernier album, le magnifique Sub Rosa In Æternum (chronique), le groupe a délaissé son death metal mystique pour embrasser pleinement des influences gothic rock, toujours avec cette touche ésotérique et psychédélique 70's. Ce sera noir, mais également coloré comme un giallo, le tout dans une ambiance sacrée (les effluves d'encens au premier rang ne feront pas de mal au public de la Suppositor Stage). Que donnent les nouveaux morceaux en live ? Est-ce que les anciens ont été remaniés ? On va se régaler, et tant pis pour Sólstafir qui jouera en même temps : il faut faire des choix, parfois déchirants, et les assumer !

Pour finir cette journée, et après avoir froncé les sourcils pendant Ihsahn, on vous propose de laisser les neurones de côté et d'aller faire la turbo-fiesta avec Carpenter Brut, dont l'efficacité à 1h du mat' est re-dou-table. Un nouvel album commencent à se profiler à l'horizon et nous verrons bien si de nouvelles choses seront jouées ou si ce sera une des dernières occasions de savourer les morceaux les plus agressifs de son dernier album en date... mais surtout, avec Klone et Tribulation prévus le même jour, on peut espérer les featurings en live sur Maniac et Leather Terror !

Samedi 16 août

On vous voit, les déviants ! On sait, bande de filous, que vous allez voir All for Metal en début d'après-midi, tout ça parce qu'il y a des muscles, des épées et que ça a l'air totalement débile. On sait que certains iront voir Rendez-Vous frimer comme s'ils avaient encore 17 ans avec leur post-punk qui, sur scène, s'adapte étrangement bien à l'atmosphère estival grâce à l'énergie du groupe (des hipsters déprimés, ou des dépressifs stylés ? A vous de trancher !). On soupçonne même que beaucoup iront voir Ill Niño par nostalgie, ou se décarcasser les neurones devant Poésie Zéro. Il sera alors grand temps d'aller souffler un coup devant le post-black metal mélancolique de MØL. De la poésie (pas zéro, cette fois), de l'introspection, de la tristesse : voilà de quoi laver vos péchés de l'après-midi. On ne sait pas encore si on espère que le groupe portera ses chemises colorées ou si, au contraire, on croise les doigts pour qu'ils retrouvent la raison d'ici là.

Si vous êtes toujours en vie, il y a Envy. Le groupe japonais sortait l'an dernier Eunoia et on ne dit pas non à un nouveau tourbillon d'émotions qui viennent se heurter les unes aux autres, d'autant plus que le chanteur Tetsuya Fukagawa est plutôt habité sur scène. Si on mange pizza burger à midi, le soir c'est salade. Ben là, c'est pareil : vous avez voulu voir les culturistes à 14h, alors maintenant, c'est Envy !

Y'en aura probablement qui iront voir Batushka parce qu'ils ont des jolis costumes et que y'a des bougies. On ne juge pas. Mais quand vous aurez fait le tour après trois morceaux et que vous réaliserez que c'était super au début mais que là, ça y est, ça devient chiant, alors vous pourrez enfin passer aux choses sérieuses et aller vous faire ratatiner par Cult of Luna. Vous avez besoin de plus d'arguments ? Non, vous avez surtout besoin d'une rambarde pour vous tenir, parce que dans le genre tellurique, ça devraît secouer.

Enfin, après avoir suivi nos recommandations, vous en aurez ras-le-bol des trucs un peu intellos, là. Vous aurez envie de twerker ou de pogoter comme des sauvages. Au choix : le duo electroclash / synthpunk / chiptune Kap Bambino qui aura la rude tâche de prouver que finir le Motoc avec de l'electro ça peut marcher même sans le show crétinoïde de Little Big, ou Krav Boca et son gros chaos punk-rap totalement fou, plein de masques, de pyro et d'énergie démentielle. Au pire, si vous avez trop bu, peu importe où vous allez, vous pourrez faire n'importe quoi et suer vos excès... et dans les deux cas, des puristes feront la méga-gueule !

Dimanche 17 août

On attaque avec des Belges, plein de Belges ! Le doom mystique de Wyatt E est à découvrir sur scène, et pas uniquement parce que les musiciens se produisent avec de jolis masques. Leurs incantations hypnotiques et intenses vous feront voyager vers des contrées assez éloignées de Carhaix, évoquant les contours des spectres de OM, My Sleeping Karma... voire Dead Can Dance, allez.

Des Belges, encore : projet radical, entier et inclassable, Doodseskader joue à 14h. Le mélange viscéral et rageur du duo belge emprunte à l'indus, au grunge, au rap... C'est puissant, féroce et redoutable. Alors si vous résistez à la pulsion d'aller faire les bonobos devant Party Cannon (à qui l'on accorde le prix du logo le plus reconnaissable au milieu d'une affiche metal extrême / grindcore), venez vous prendre les énormes mandales de Tim de Gieter (ex-Amenra) et Sigfried Burroughs (Kaptain Korsakov). C'est un des projets les plus atypiques de cette édition et vos tripes en ressortiront toutes secouées.

Du rock lourd, sombre, psychédélique et mystérieux pour se faire hypnotiser à l'apéro ? Check, on prend ! Le seul défaut des Suédois de Gaupa est, finalement, de jouer en même temps que Fear Factory qui risque d'attirer les amateurs de sensations fortes et les nostalgiques. Et pourquoi ne pas faire le yo-yo entre les deux et alterner entre le metal industriel poids lourd des uns et la poésie éthéré des autres ?

Après quatre jours de festival, on a parfois envie de plaisirs simples... et d'un gros feu d'artifice pour finir en beauté ! On entend d'ici les grognons grogner et les bougons bougonner : "non mais ho, ici c'est l'Motoc, hein, pas le Club Med d'à côté, vous avez cru que vous étiez à Disneyland, gneu gneu gneu". Pour le feu d'artifice, il y aura tout de même Kanonenfieber et leur black metal aux rythmiques impitoyables... et au jeu de scène plein de pyrotechnie et d'explosions. Si jamais vous êtes devant, on vous suggère plus que d'habitude des protections auditives. Il en va de votre survie.

Amusez-vous, découvrez de drôles de choses... Et on espère que vous viendrez après le festival nous rouspéter parce qu'à cause de nous vous avez vu des trucs que vous avez trouvés horribles ! On s'en reparlera dans les jours qui suivront le festival avec nos habituels compte-rendus, des photos et quelques interviews.

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Pierre Sopor

Rédacteur / Photographe