Chronique | Wednesday 13 - Horrifier

Pierre Sopor 4 octobre 2022

L'automne est là : les feuilles tombent, la nuit dévore le jour et le brouillard nous recouvre de son manteau humide. Et quoi de mieux pour accueillir la saison des frissons qu'un nouvel album de WEDNESDAY 13, gamin turbulent devenu le boogeyman de l'horror-punk ? Horrifier arrive à point nommé avec son lot d'hymnes horrifiques pour faire la fiesta dans une ambiance joyeusement macabre.

Ces dernières années, on a pu observer la mutation de WEDNESDAY 13 dont le son devenait de plus en plus lourd, plus metal, plus sinistre, plus riche aussi. Les gimmicks et jeux de mots étaient toujours de la partie, mais l'horizon s'était sacrément assombri. De l'aveu de l'artiste lui-même, Horrifier revient à une forme de simplicité : confinés, les membres du groupe ont bossé dans leur coin, sans producteur ni prise de tête et nous ont concocté des titres rock'n'roll sans fioritures. On reste dans la pesanteur en ouverture avec Insides Out et sa rythmique aliénante, industrielle, son atmosphère sinistre : le mordant est bien là. Le sens de la formule aussi, comme le rappelle Exhume and Devour : les riffs sont simples, on ne dépasse pas les trois minutes mais chez WEDNESDAY 13 le refrain fait souvent l'essentiel du boulot et le talent du showman pour les lignes de chant qui font mouche se confirme. 

Horrifier donne peut-être parfois l'impression de céder à la facilité que ses prédécesseurs les plus récents en optant pour des titres plus immédiats. Le retour a plus de légèreté et aux morceaux punk-rock (Good Day to Be A Bad Guy) peut faire plaisir aux amateurs de cette facette moins sombre, mais on en ressort moins surpris. Quand WEDNESDAY 13 se lance dans l'hymne dansant et nostalgique, le constat est similaire : il manque à You're so Hideous un peu de profondeur pour se démarquer de ce que le groupe a déjà fait (dans un ton similaire, on lui préfère le morceau de 2015 I Love Watching You Die). Pourtant, et surtout grâce aux talents de chanteur de Joseph Poole, Horrifier brille souvent dans la noirceur et c'est quand il pioche dans ses sentiments plus mélancoliques qu'il nous touche le plus.

Return to Haddonfield, Halfway to the Grave ou The Other Side, dédiée à Joey Jordison son regretté camarade chez les MURDERDOLLS, empruntent ce chemin du vague à l'âme. Adieu les monstres gluants grimaçants et amusants ou les tueurs masqués menaçants, c'est là le temps des spectres errant parmi les tombes dans la grisaille, maussades. Et c'est aussi là que Poole excelle, dans ces complaintes spooky qui sentent le caveau et dégagent une puissance émotionnelle douce-amère qui fonctionne toujours.

Peu importe finalement, qu'on le préfère frétillant et divertissant, méchant et agressif (Christine : Fury in the Night - le bougre a poncé les films de John Carpenter avant d'enregistrer l'album) ou mélancolique : WEDNESDAY 13 délivre avec Horrifier une nouvelle collection d'humeurs, embrassant toujours avec amour et passion sincère les frayeurs et plaisirs variés de l'horreur. Ce nouvel album est sans surprise mais sans prétention ni prise de tête non plus, il est comme cette tasse de thé bien chaude ou cet énième re-visionnage de l'intégrale des Chucky, de la Famille Addams ou d'un film avec Vincent Price : immédiatement familier, aux frissons confortables et rassurants et au plaisir toujours intact.