Chronique | Then Comes Silence - Trickery

Pierre Sopor 3 avril 2024

Du côté de Then Comes Silence, les choses vont vite et sans en mouvement constant. Avec en moyenne un album tous les deux ans depuis sa formation, le groupe suédois n'a pas le temps de tergiverser : ce ne sont ni les changements de label (celui-ci sort via Metropolis Records) ni ceux de line-up (le groupe est désormais un trio) qui vont déstabiliser Alex Svenson et sa bande. Trickery en est la preuve : enregistré en seulement trois jours (on vous avait dit que ça allait vite), l'album est le signe d'une stabilité et d'une confiance à toute épreuve.

Il y a d'ailleurs un certain décalage entre toute cette agitation en coulisses et la sérénité que dégage la musique de Then Comes Silence, jouant au sein des frontières définies par la cold wave, le rock gothique ou encore le post-punk. La voix du chanteur-bassiste séduit immédiatement, souvent en douceur mais parfois plus sinistre (par exemple sur l'entêtante Like a Hammer ou encore Blind Eye et ses riffs plus agressifs, très réussie), et chaque morceau est un modèle d'efficacité.

Then Comes Silence a ce sens de la mélodie contagieuse, de la rythmique irrésistible et ce talent pour les morceaux concis aux refrains fédérateurs. Un certain sens de la fête se dégage de Trickery : l'entrain de Feel the Cold, les refrains scandés de Stay Strange, la mystérieuse intensité fiévreuse de The Masquerade, la rage très rock'n'roll de Dead Friend... l'album ne manque pas d'hymnes. Si Then Comes Silence maîtrise toujours aussi bien son sujet et dégage comme jamais cette impression de facilité et de fausse simplicité, le trio joue cependant une nouvelle carte : jamais les synthés n'ont été aussi présents dans leur musique. On peut y voir l'influence du side-project de Svenson, Neonpocalypse, mais aussi les influences de Emma Nylén (Emmon) et Gözde Duzer (Aux Animaux... serait-ce son thérémine que l'on entend au début de Never Change ?) qui ont participé à l'enregistrement. L'électronique apporte ce supplément de profondeur et parfois une emphase dramatique (la mélancolie lugubre de Tears and Cries, le final cinématographique très réussi de Ghost House, les touches fantomatiques de The Masquerade et son ambiance spooky feutrée, parfaite pour explorer une maison hantée) tout en accentuant cette énergie festive.

Avec Trickery, Then Comes Silence n'a jamais été aussi convaincant. Il y a du punch, de l'élégance et un lot de potentiels hits. Le groupe mérite bien son statut de "jeune groupe culte" de la scène gothic rock. Il y a ce respect des codes mais aussi cette vraie richesse, cette singularité qui les caractérise et cet équilibre sur le fil entre un univers sombre et des titres accrocheurs non dénués de lumière. Voici donc l'album parfait pour danser sous la pluie dans les ruines d'une fête foraine abandonnée !