Chronique | LATX - Everything that Hurts

Pierre Sopor 1 juin 2022

Ils sont quatre, ils aiment les photos et noir et blanc et le rock industriel des années 90. Est-ce qu'ils sont jeunes ? Est-ce qu'ils sont beaux ? On n'oserait se prononcer, et surtout, on s'en fout. C'est LATX, un groupe flambant neuf originaire de Clermont-Ferrand qui a sorti son premier EP, Everything That Hurts début 2022.

Nappe atmosphérique de plus en plus pressante en intro, puis quelques notes fantomatiques au clavier qui résonnent dans la brume, un chant expressif tout en murmures torturés et explosions rageuses sur les refrains et des riffs qui jaillissent pour nous prendre à la gorge : les influences ne sont pas trahies. On pense évidemment très fort à NINE INCH NAILS (et ses petits cousins tels que FILTER ou STABBING WESTWARD) pour cette façon d'utiliser l'électronique mais aussi la place accordée aux mélodies, aux guitares et aux émotions, mais on entrevoit également parfois des airs de WHITE ZOMBIE ou de TYPE O NEGATIVE (la fin d'In Love We Rust).

Au-delà d'un fétichisme qui dépasse la simple posture nostalgique (de NIN, on pense d'ailleurs plus souvent à With Teeth sorti au milieu des années 2000 qu'aux premiers albums), LATX affirme son identité, attaque la jugulaire avec énergie (Blast), nous embarque avec ses boucles électroniques hypnotiques (Vigil) tout en laissant à des passages plus ambiants installer une chouette mélancolie et un petit parfum futuriste. Ce qui plaît le plus dans LATX, finalement, c'est aussi sa simplicité : au chant, Romin n'en fait pas des tonnes dans les gimmicks, le groupe n'empile pas les couches bruitistes noise ou ne cherche pas à expérimenter dans tous les sens, ne se grime pas pour essayer de masquer un manque d'inspiration musicale derrière de belles photos. C'est efficace, bien produit, bien composé (simplicité n'est pas pauvreté), chaque élément a un sens (on est particulièrement fan de ce clavier creepy auquel il suffit de quelques interventions pour donner à un morceau plus d'ampleur, comme sur Marks of No Joy). Certes, LATX ne crache pas du sang (noir) et fait dans le facile à écouter, facile à aimer, mais ils ne trichent pas, n'essayent pas de paraître ce qu'ils ne sont pas (pas besoin, quand on a le talent) et ne tombent pas non plus dans le piège de la mièvrerie agaçante qui affligent d'autres groupes du genre.

Everything That Hurts est un premier EP réussi. C'est non seulement techniquement très propre, mais on ressent surtout la passion des musiciens pour ce qu'ils font et une forme de modestie finalement rafraîchissante. LATX ne prétend pas réinventer l'indus mais se fait plaisir : en général, c'est comme ça que l'on transmet ce plaisir à d'autres et l'EP ne déroge pas à la règle. Plaisir partagé : ses morceaux accrocheurs tournent très vite en boucle et on attend désormais la suite avec impatience.