Chronique | John Carpenter - Lost Themes III : Alive After Death

Pierre Sopor 13 février 2021

Il est de retour, derrière ses lunettes et sa moue boudeuse, son visage sévère auréolé de cheveux blancs comme neige. La démarche s'est raidie avec les années mais le bonhomme en impose toujours autant : on ne déconne pas avec John Carpenter, peut-être le plus grand créateur de cauchemars pour le septième Art. L'homme n'a plus réalisé de long-métrage depuis plus de dix ans mais s’épanouit comme rock-star en jouant ses propres bande-sons et de nouveaux morceaux. Une évidence. Vivant après la mort, grand-père John ? Parce qu'il y aurait des fous pour l'enterrer ? 

Ce troisième Lost Themes, sous-titré Alive After Death, s'est fait attendre : cinq ans le séparent de Lost Themes II. Entre temps, Big John nous a servi une relecture de ses classiques en 2017 avec John Carpenter - Anthology (Movie Themes 1974-1998) , gratifié de deux tournées, et a surtout supervisé le retour au cinéma de son enfant prodige Michael Myers, dont il composait bien-sûr la musique. On ne va pas finasser 107 ans : quand on se plonge dans l'univers de John Carpenter, on a des attentes bien précises. On veut un synthé quasi minimaliste capable de nous glacer le sang d'une mélodie simple et efficace, une ligne de basse répétitive et angoissante et, avouons-le, quelques guitares bien cheesy. La musique, c'est John Carpenter, c'est ce qui procure ce petit frisson de bien-être dès le générique de début.

Lost Themes III : Alive After Death ne dépaysera personne. Accompagné de son fils Cody Carpenter et son filleul Daniel Davies, le maître de l'horreur prolonge et peaufine son œuvre sans se trahir ni se réinventer. L'album contient son lot de hits catchy qui pulsent bien, dans la lignée de Vortex ou Distant Dream (Weeping Ghost, Skeleton, The Dead Walk) et d'atmosphères gothiques à la noirceur théâtrale particulièrement théâtrale (Cemetery, Carpathian Darkness). John Carpenter aime les gros durs avec des coupes mulet qui mâchent du chewing-gum, c'est donc en toute logique qu'il fait gémir les guitares comme plus personne depuis la fin de la Guerre Froide (le final d'Alive After Death, Dead Eyes).

Lost Themes III n'est pas un renouveau dans la carrière de Carpenter, et tant mieux ! On y retrouve le génie du réalisateur compositeur pour les ambiances sombres et les morceaux simples mais efficaces, où se mélangent rock, électronique, synthwave et même industriel. Et puis, bon, on ne va pas se mentir : si on aime autant sa musique, c'est surtout car elle nous fait revivre les sensations si uniques de son cinéma. Alors pourvu que ça dure.