Chronique | John Carpenter - Lost Themes

Pierre Sopor 3 février 2015

Est-il nécessaire de présenter John Carpenter, un des plus grands réalisateurs de l'histoire du cinéma d'horreur ? Halloween, The Thing, Prince des Ténèbres, L'Antre de la Folie, New York 1997, Jack Burton dans les Griffes du Mandarin... Jusqu'aux années 2000, ses moins bons films étaient "seulement" cultes, alors que ses meilleurs sont des chefs d'oeuvre ayant marqué l'histoire du genre. Habitué à se débrouiller avec des budgets serrés, John Carpenter cumule les rôles : réalisateur, scénariste, producteur... mais aussi compositeur de ses propres bandes-sons, dont certaines sont devenues mythiques (les thèmes musicaux de Halloween ou Assaut, par exemple). Lost Themes, contrairement à ce que son nom indique, n'est pas une compilation de travaux non utilisés : il s'agit d'un album entièrement composé pour l'occasion, à la manière de bandes-son de film qui n'existent pas. Et si les synthés analogiques des années 80 ont laissé leur place aux ordinateurs, dès l'excellente Vortex le style de Big John est reconnaissable entre mille : instrumentation limitée (un poil de piano), mélodie simple et pulsation répétitive de basses caractérisent son style redoutable d'efficacité. Après cette entrée en matière qui pouvait évoquer ses films plus orientés action, Obsidian est plus atmosphérique et étrange, avec ses sonorités aigües évoquant THE GOBLINS, d'autres habitués du cinéma d'horreur plusieurs fois collaborateurs de Dario Argento. On repense aux GOBLINS dans l'intro de Mystery, alors qu'entre temps quelques guitares s'invitent à la fête sur Fallen, même si le résultat frôle parfois le kitch (Domain). Maîtrisant parfaitement ses ambiances, JOHN CARPENTER signe avant la fin quelques bijoux de noirceur (Abyss, Purgatory). Pour l'anecdote, on peut noter que la version collector contient des remixes intéressants par Nivek Ogre (SKINNY PUPPY) ou JG Thirlwell (FOETUS). Quoi qu'il en soit, alors que jouer la carte d'un retour aux années 80 pour des artistes d'une scène électroniques (qui n'ont pour certains pas ou peu connu cette période ! ), JOHN CARPENTER sait incorporer l'essence même de son travail d'il y'a 20 ou 30 ans pour un résultat à la fois moderne et nostalgique. Et alors que toute une vague new-retro-wave menée par PERTURBATOR, CARPENTER BRUT et autres MEGADRIVE fait de plus en plus de bruit avec des délires old-school et séries B, JOHN CARPENTER s'impose encore une fois comme un maître dans ce qu'il fait. Mais avec près de quatre décennies d'expérience en tant que compositeur, on ne pouvait en attendre moins de son premier album.