Chronique | Der Weg Einer Freiheit - Innern

Maxine 3 septembre 2025

Der Weg Einer Freiheit, groupe de black metal allemand formé en 2009 par Nikita Kamprad (chant / guitare) et composé actuellement également de Nicolas Rausch à la guitare, d'Alan Noruspur à la basse et de Tobias Schuler à la batterie, sortira Innern, son sixième album studio, le 12 septembre 2025 chez Season Of Mist. Alan Noruspur est arrivé en tant que bassiste sur la composition de cet album en 2024 (même s'il fut déjà le remplacent de Nicolas Rausch sur la tournée que fit le groupe en 2023) suite à l'annonce de Nicolas Ziska de son envie de faire une pause au sein du groupe.

Au fur et à mesure de sa carrière, les influences du groupe se sont étoffées, les sonorités se sont parées de textures complexes à l'atmosphère dense mais accessible, donnant vie avec l'ensemble de ses créations à un organisme gigantesque aux airs sombres mais majestueux qui vient creuser au plus profond de nous lors de chaque nouvelle écoute. Innern, qui signifie d'ailleurs "intérieur" en allemand, ne fait pas exception dans cette recherche introspective synonyme à la fois d'écoute de soi, de lutte, d'échappatoire, et de liberté. L'approche pour la composition de cet album fut différente des autres cette fois-ci, puisque Nikita a composé son intégralité dans son propre studio et a supervisé sa création ainsi que sa production, de l'enregistrement, au mixage en passant par le mastering; ce qui n'empêche pas une cohésion artistique globale qui se ressent du début à la fin. 

Si la sincérité est maitresse, à priori, de toute création d'œuvre d'art, ce que Der Weg Einer Freiheit maitrise le mieux en cela, c'est le mariage entre spontanéité et méticulosité. Le besoin de crier une souffrance pour trouver l'apaisement d'un silence intérieur, et en même temps ce besoin d'expérimenter avec passion, de tester des alliances inédites entre les notes, les instruments, les sons, les textures ou les voix. L'alliance entre la batterie et la basse aux effluves hantées sur Fragment semble donner naissance à un autre monde, étrange, tandis que la résonance des voix posées sur Eos lui donnent une dimension polycéphale. La richesse de ce dernier à la composition stellaire oscille en effet entre plusieurs chants : des cris déchirants en voix claire, des échos lugubres aux teintes graves, des hurlements viscéraux... le voyage est riche.

Marter est également un petit bijou. Condensé enveloppant de tourments, elle résonne comme une alarme lancinante, celle qui nous ordonne de nous arrêter, pour souffler. La batterie est martiale et implacable, tandis que les guitares cherchent un refuge au désespoir en créant une symbiose de toute beauté. Les synthés mélancoliques de Xibalba se fraient également rapidement un chemin vers notre conscience, et si la musique retranscrit parfaitement les angoisses dont elle parle, elle apaise aussi par sa simple présence nos âmes tourmentées : si le morceau parle d'une flamme à retrouver en nous, celle qui nous maintient en vie si petite soit-elle face à nos peurs, l'une des clé s'obtient peut-être ici, à son écoute. 

La pause que nous offre Finisterre III mérite, elle, un arrêt sur image. Déjà parce qu'elle marque une limite symbolique autant qu'un lien discret entre les quatre premiers morceaux, écris par Nikita, et Forlorn, le titre suivant, conclusion de l'album composée par les deux musiciens Nikita et Nicolas (ce dernier en a entièrement écrit les paroles) et dont le chant, tout en vulnérabilité est aussi entièrement en anglais pour une plus grande accessibilité. A l'écoute de Finisterre III, intégralement instrumentale, la proximité avec le compositeur passe par un son littéralement à fleur de peau, comme si les micros avaient été placés au plus près possible de l'instrument. On peut alors entendre si l'on tend l'oreille comme les craquements d'un vieux piano habité par le temps et ses fantômes, aux notes étrangement désorientées, mais également la respiration calme et rassurante du musicien, qui nous montre encore une fois tout l'intérêt et l'amour qu'il a pour la musique classique. Cet enregistrement comme gravé sur une bobine de film endommagé, que l'on sait spontané et joué d'une traite, finit de nous reconnecter à une réalité plus apaisée.

Le groupe a confié que la portée de cet album en live serait égale à celle en studio, sa production ayant été pensée pour créer des atmosphères puissantes mais lisibles, qui rendent audibles toutes les couches en arrière-plan sans occulter le cœur du morceau ni son authenticité... Autant dire que l'on a hâte d'aller constater cela par nous même !

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