Ash Code revient de loin : le trio italien reconnaît que des difficultés personnelles ont mis fin à leur aventure courant 2024, six ans après la sortie de l'album Perspektive. Ash Code était mort. Puis, la vie : la naissance d'un enfant a fait renaître le groupe de ses cendres, leur conférant une nouvelle énergie. Synthome est donc un témoignage de ces difficultés, autant une mort qu'une renaissance. Son titre fait référence l'idée de sinthome développée par Jaques Lacan et qui, dans la psychanalyse moderne décrit ce qui réussit à faire tenir ensemble les trois ronds de l'imaginaire, du réel, et du symbolique (par exemple, la littérature chez James Joyce, observe Lacan). Pour Ash Code, les fils maintenant leur existence seraient donc les synthétiseurs (on pense alors au morceau Living for the Sound, dont le titre prend tout son sens... et on comprend cette orthographe avec un "y" !).
Eh bien, heureusement qu'ils les ont rebranché, alors ! Mélodie entêtante aux échos spectraux, chant fantomatique et lointain, rythmiques accrocheuses... Ash Code a la formule, entre synthpop et post-punk, pour nous envelopper de sa mélancolie et nous hanter. Les voix se succèdent, celle plus éthérée de Claudia Nottebella laissant place au timbre grave et sépulcral d'Alessandro Belluccio. Les mot semblent venir d'une autre réalité, les synthés servant de medium pour communiquer avec les âmes en peine. On frissonne alors en savourant l’atmosphère spooky de Scar ou la menace contenue dans Run in the Dark et Choke, à qui les influences EBM imposent leur intensité et leur nervosité.
Mort et renaissance : si Synthome se visite comme une maison hantée perdue dans le brouillard dont on admire les meubles sous une couche de poussière en essayant d'en saisir les souvenirs, il suinte également de vie. L'espoir jaillit, la lumière nous aveugle et Ash Code semble manifester son désir de vivre avec des morceaux comme Dancing to the Noise et son énergie frénétique. Il y a de la dureté, du deuil, mais aussi une douceur bienveillante qui se dégage de cet ensemble. Angel Oscuro souffle le chaud et le froid, avec ses lamentations théâtrales murmurées en espagnol et ce son de basse venue tout droit du nord de l'Angleterre. Des nuances, des contrastes, Ash Code se perd en contemplations poétiques et romantiques mais se montre aussi plus frontal, étoffant ses mélodies soigneusement tissées d'une ossature tantôt post-punk, tantôt EBM.
L'album a été mixé et masterisé par Doruk Öztürkcan de She Past Away : ces gens-là savent y faire pour faire danser les spectres. On ressort de l'exploration de Synthome comme d'une séance de spiritisme au cours de laquelle Ash Code nous a étalé ses compétences, à la fois synthèse et apogée de leur style, revigoré. On peut voir dans cet album aussi bien des funérailles qu'une renaissance, la conclusion d'une première partie de carrière mais également les fondations solides sur lesquelles construire la suite.