Chronique | A.A. Williams - As the Moon Rests

Pierre Sopor 11 octobre 2022

Les choses sont allées très vite du côté d'A.A. WILLIAMS : quelques EPs depuis 2018, un premier album en 2020, des collaborations fréquentes avec le groupe de post-rock japonais MONO mais également avec la violoncelliste JO QUAIL, et toujours cette mélancolie qui s'empare de l'auditeur et de son attention. Après une collection de reprises sorties en plein confinement (Songs From Isolation), l'artiste est de retour avec un "vrai" nouvel album, As the Moon Rests.

Il ne faut à A.A. WILLIAMS que quelques secondes pour emporter notre adhésion immédiate, sans retenue : l'alchimie entre la lourdeur de son spleen et la légèreté de son chant, entre la pesanteur des guitares et les sentiments vaporeux contenus dans les mélodies est parfaite. C'est d'emblée poignant, on ne peut faire autrement que se taire respectueusement et se laisser chambouler de gauche à droite par Hollow Heart, Evaporate ou Murmurs et leur inertie éthérée, leurs lignes de chant séduisantes et surprenantes. Entre intimisme et élans émotifs, les mélodies déroulent leur richesse sur la durée et l'élégance de ce vague-à-l'âme à la fois gothique et légèrement progressif nous rappelle régulièrement ANTIMATTER, alors que l'on est frappés par l'évolution du son. Après Forever Blue, enregistré en grande partie à domicile par l'artiste, on a l'impression de redécouvrir sa musique qui, notamment grâce à un orchestre à cordes, gagne ici une ampleur et une puissance nouvelle. Quand As the Moon Rests s'éloigne un peu des ombres doom qui le plongeait dans ce brouillard sublime et intense, il ne perd pas pour autant en pertinence ni en efficacité. Le dosage entre ombres et lumières évolue d'un morceau à l'autre mais les nuances sont subtiles et l'atmosphère douce-amère alors que l'on passe des ténèbres pleines de fantômes de For Nothing (que ne renierait pas Chelsea Wolfe) à l'espoir jaillissant de Golden.

A.A. WILLIAMS avait su convaincre son monde dès ses premiers pas et continue de grandir. As the Moon Rests est un album d'une classe folle sur lequel on admire le talent de la multi-instrumentiste pour le clair-obscur, pour le coup de blues écrasant et poétique mais aussi pour la personnalité forte que l'on y sent. Cette musique vient de l'âme sans aucun doute, laissons-la donc envahir les notres.