Chronique | Ice Ages - Vibe of Scorn

Pierre Sopor 21 juillet 2021

Le réchauffement climatique ne semble pas avoir d'effet sur Richard Lederer, bien au contraire : alors que pendant deux décennies, les albums d'ICE AGES étaient espacés de nombreuses années, ce Vibe of Scorn arrive seulement deux petites années après Nullify (chronique).

N'attendez pas de Lederer une quelconque remise en question de sa formule : Vibe of Scorn est toujours aussi monolithique qu'à l'accoutumée et le coeur d'ICE AGES reste de glace. Comme le dit l'artiste, s'il devait changer de style alors il le ferait sous un autre nom. Voici donc une nouvelle fournée de morceaux menaçants, au tempo lent et hanté par le chant grave et distordu de Lederer. On n'est pas là pour danser, notre maître de cérémonie reconnaissant volontiers s'être désintéressé d'une scène dark electro à laquelle il ne trouve plus rien de sombre depuis qu'elle ne lorgne que vers le dancefloor, la comparant à l'eurodance.

ICE AGES s'écoute toujours seul, dans le noir de sa cave humide, et en tirant la gueule. On retrouve néanmoins avec plaisir cette ambiance d'usine abandonnée en pleine Sibérie, ces boucles hypnotiques, ces percussions métalliques qui nous asservissent à des machines que l'on image rouillées, massives et imperturbables, cette réverbération sépulcrale et ces notes de synthés aigues et anachroniques. On apprécie cependant une évolution dans les mélodies, plus complexes, plus longues que sur Nullify, ce qui réserve quelques belles surprises (la mélancolie de Downfall), mais aussi des passages moins convaincants (peut-être car moins "accrocheurs"), comme Torment of the Gods et sa tonalité plus lumineuse. La lumière filtre d'ailleurs peut-être plus souvent que d'habitude, Vibe of Scorn ménageant quelques parenthèses en apesanteur assez poétique (As Winter Comes...), contrastant forcément avec la lourdeur des rythmiques et insufflant une âme à ses machins lugubres.

Paradoxalement, bien que n'arrivant que deux ans après le précédent album d'ICE AGES, Vibe of Scorn semble plus abouti et travaillé. Bien sûr, la formule ne connaît pas de transformation radicale, mais on sent chez Lederer une envie de pousser un peu plus loin ses mélodies et ses lignes de chant, ce qui ne suffira probablement pas à faire changer d'avis ceux qui s'étaient lassés du projet depuis This Killing Emptiness. Les autres ne bouderont pas leur plaisir, surtout qu'il se murmure que l'artiste autrichien travaillerait déjà à de nouveaux titres.