Chronique | DRØWND - Drownd

Pierre Sopor 9 janvier 2020

DRØWND est un tout jeune projet ayant éclos au courant de l'année 2019. On a en effet pu découvrir le travail de Joe Crudgington via deux EPs et ses remixes pour CUBANATE ou THE JOY THIEVES. Tout a été très vite pour le jeune artiste, repéré par le label Armalyte Industries et qui, quelques mois seulement après les premiers pas de DRØWND, sort un premier album éponyme.

Aucune surprise majeure ici : l'univers est dans la continuité des EPs, jusqu'à l'autoportrait en polaroïd servant d'artwork et DRØWND propose un rock industriel brut et viscéral. Il fallait s'attendre à ce que la fin des années 2010 et le début des années 2020 voient les années 90 revenir au goût du jour : au tour de la génération ayant grandi à cette époque de s'exprimer après le revival 80's des dernières années. Crudgington a dû être biberonné aux albums de MARILYN MANSON ou de NINE INCH NAILS du milieu de cette décennie, dont on retrouve la rage, la noirceur et le nihilisme. Sa voix, grave et chaude qui jaillit entre deux agressions de guitare, prend d'ailleurs des airs de crooner déglingué à la Antichrist Superstar, la mégalomanie et la comédie en moins.

Ce qui fonctionne chez DRØWND, c'est en effet une forme de sincérité, une immédiateté et une spontanéité qui nous prend aux tripes dès les premières explosions rageuses de Now You Know. Ce n'est pas forcément toujours très chiadé mais les imperfections de l'ensemble contribuent à sa sympathie : ici, l'artiste ne triche pas et nous balance ses viscères avec un désespoir et une hargne communicative, réservant quelques lignes de chant et mélodies qui font respirer l'ensemble (Misery, Too Far Gone). Ce premier album est plein de fureur, de cris, de sueur et de larmes. La voix nous atteint directement, sans que l'humain ne soit annihilé par de nombreux filtres, ce qui accentue encore la proximité et rend les émotions toujours plus poignantes. DRØWND est un animal féroce et, si le projet prend ses racines dans les années 90, des influences modernes s'y devinent, notamment celle du punk-rap-indus-hardcore des fous furieux de HO99O9 sur les très sauvages Cold et Burn.

Certes, ce premier album est très court. Sa durée aurait pu être gonflée en y ajoutant les morceaux des précédents EPs, mais il n'en est rien : chaque titre est inédit et, en ne s'éparpillant pas dans la longueur, DRØWND réussit à conserver son énergie du début à la fin là où de nombreux jeunes groupes font l'erreur de vouloir trop en faire. Comme le plus possédé des cris de rage, l'œuvre est brève, intense et cathartique. Avec son authenticité et sa sensibilité d'écorché, Crudgington a su nous toucher dès ses premiers pas et, s'il conserve cette sincérité, devrait continuer à grandir.