Atonalist + Machinalis Tarantulae @ Petit Bain - Paris (75) - 22 septembre 2018

Live Report | Atonalist + Machinalis Tarantulae @ Petit Bain - Paris (75) - 22 septembre 2018

Pierre Sopor 24 septembre 2018 Pierre Sopor

Le label Audiotrauma et Laboratoire Chromatique Prod proposaient une bien belle soirée à Paris pour marquer le début de l'automne. ATONALIST, fascinant projet du duo composé des multi-instrumentistes Renaud-Gabriel Pion et Arnaud Fournier, qui sévissait notamment dans HINT, se produisait sur la scène de Petit Bain. Sur son premier album, le duo pouvait compter sur la présence occasionnelle d'un invité de marque puisque l'immense Gavin Friday, chanteur des cultissimes VIRGIN PRUNES, donnait de la voix sur quelques morceaux. Et c'est ce même Gavin Friday qui, de manière tout à fait exceptionnelle, était présent ce soir sur scène pour donner à la soirée une aura toute particulière. Pour compléter le tableau, l'incroyable duo MACHINALIS TARANTULAE ouvrait la soirée avant que des DJ sets ne fassent se trémousser la foule toute la nuir.

MACHINALIS TARANTULAE

MACHINALIS TARANTULAE avait donné un premier concert parisien il y a un an et demi au Klub (report). Ça avait été un grand succès, et après une tentative avortée de concert au Bus Palladium, les parisiens attendaient fermement le retour du duo sur scène. Les deux artistes, fidèles à elles-même, attaquent leur set dans une ambiance nimbée de mystère : il y a de la fumée, très peu de lumière et quelques stroboscopes derrière pour nous plonger dans un univers atypique, à la fois baroque et moderne. Justine Ribière et sa viole de gambe assure l'essentiel du chant, cachée à la fois par l'obscurité et par un pansement sur l'oeil, séquelle d'une opération dont on lui souhaite de vite se remettre, alors que Miss Z alterne entre sa guitare et son tom. La salle, bien plus ample que le Klub, nous permet d'apprécier un son irréprochable : MACHINALIS TARANTULAE gagne une intensité nouvelle, presque sauvage, alors que le chant devient cris et que les percussions de Miss Z, à l'impact quasi sauvage, confèrent à la musique quelque chose d'à la fois industriel et tribal. La musique du duo acquiert une dimension plus rock'n'roll et viscérale pour un résultat impressionnant : on ne s'attend pas forcément à prendre une telle claque face à deux musiciennes assises tout le concert et un instrument datant de la Renaissance. L'énergie déployée est monumentale. C'est à la fois élégant et noble, brutal et primitif. MACHINALIS TARANTULAE propose quelque chose d'unique, s'imposant après deux albums (un troisième est en préparation) comme un des projets les plus enthousiasmants et passionnants de la scène industrielle française qu'il faut absolument voir sur scène. Elles seront à Mulhouse avec IGORRR en novembre et à Prague pour le festival Audiotrauma début mars, ne les ratez pas !

Setlist :
01. Obsolete
02. Se l'Aura Freeze
03. They Said
04. Pieuvre
05. Melanocetus
06. Pizzica
07. Time Stands
08. Rot
09. Laid in Earth
10. Sable
11. Clown
12. Dark Dark Green
13. Rusty Cage

ATONALIST 

Avec un premier album sorti il y a un an environ, ATONALIST était probablement une découverte pour beaucoup de gens, attirés par la présence de Gavin Friday en guest de luxe. Admettons : la musique du duo peut déstabiliser, et l'étiquette de "musique" savante ne devrait pas les irriter plus que ça. Surprenant, cérébral et expérimental, ATONALIST n'est pas un groupe facile d'accès. La présence de Gavin Friday sur scène vient cependant faciliter l'entrée dans leur univers en apportant, avec sa voix, sa présence et ses mimiques, une humanité à laquelle se raccrocher. Jouer très rapidement dans le set Road to Perdition, un des titres les plus accessibles et séduisants de l'album Atonalism, est un bon moyen de capter l'attention du public, de l'inviter en douceur dans ce monde musical imprévisible. Quand Friday quitte la scène après une poignée de titres, l'ambiance devient lynchéenne. Le saxo n'y est pas pour rien, les deux musiciens se répondent sur un fond électronique, passant par une floppée d'instruments (guitare, trompette, clarinette, etc). Il y a quelque chose d'à la fois très construit dans la musique d'ATONALIST, un je-ne-sais-quoi qui nous fait sentir le travail minutieux derrière, mais également un côté très instinctif, comme si l'on était face à une espèce d'improvisation dont rien ne viendrait brider la liberté. Quand Gavin Friday revient sur scène, son apparence a évolué : son costume est déchiré, il a un cocard à l'oeil. L'homme est exuberant et expressif et apporte à nouveau une énergie plus punk mais aussi plus d'émotion au concert. Probablement que la reprise de Caucasian Walk des VIRGIN PRUNES a touché quelques cordes sensibles. Dans le public, quelqu'un me dit "quelle voix ! Chut, écoute... Je l'ai vu en 88, moi". Moi, en 88, je faisais peut-être pipi sur le pot, mais je ne suis pas sûr. Alors je me tais, et j'écoute.

La soirée était belle. En proposant deux groupes aux univers si uniques et riches, Audiotrauma et Laboraoire Chromatique Prod ont réussi quelque chose de très particulier, une sorte de capsule hors de la réalité et du temps. Vu le succès rencontré, on espère bien que l'événement ne reste pas une exception, même s'il restera probablement un souvenir particulier pour beaucoup.

Setlist : 
01. Different to the others
02. Road to Perdition
03. Spin (Sweet Noise)
04. The Philosophers' Argument
05. Gottesanbeterin
06. Our Fearless Leader
07. Realistic
08. Massacre
09. Caucasian Walk (VIRGIN PRUNES cover)
10. Violent Men (ANOHNI cover)
11. Love Is Just A Word
12. Road to Perdition